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           B I L L E T S  -  C H R O N I QU E S 

 

               

    Billets, chroniques, entretiens

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Délit de fuite

Billet Daniel Fattore  16.01.17

La méduse.ch  27.12.2016

Chemins de traverse

Billet Daniel Fattore  22.06.16

François Gachoud 12.3.17

 

Allons voir si la rose...

Billet Daniel Fattore  24.11.15

La méduse.ch 30.06.2016

 

Entretien sur l'autoédition,

littérature-romande.net 3.04.15
 

La fenêtre aux alouettes,

Billet Daniel Fattore  21.01.15

Paquet surprise

Billet Daniel Fattore 26.12.14
 

Des taureaux et des femmes,

Billet Daniel Fattore 10.04.13

 

Des taureaux et des femmes,

Interview Entre les lignes Espace 2 RTS 3.03.11

 

Un fauteuil pour trois,

Billet Daniel Fattore 23.01.11

 

DÉLIT DE FUITE

Accident ou meurtre? Catherine Gaillard-Sarron ose le roman policier

Billet de Daniel Fattore le 16.01.17

 

Avec "Délit de fuite", l'écrivaine franco-suisse Catherine Gaillard-Sarron poursuit son exploration des genres littéraires en offrant un premier polar. Auto-édité avec soin, celui-ci a paru en fin d'année dernière, quelque temps après son premier roman "Allons voir si la rose...", qui fait suite à plusieurs recueils de nouvelles et de poésie.

C'est un fait divers qui constitue le nœud de l'intrigue de "Délit de fuite": une voiture fonce sur une personne qui traverse la route, celle-ci meurt. Accident? Cela aurait pu se passer ainsi. Mais Annie Belmont, témoin oculaire, vient faire une déposition qui sème le trouble et s'avère cruciale pour l'enquête. Il y a anguille sous roche... et autour du commissaire Henry Baud, les policiers explorent toutes les pistes.

L'auteure construit avec Henry Baud un personnage à la fois discret et attachant: on le voit œuvrer avec méthode, de façon bien carrée, et coacher son escouade d'inspecteurs en les priant à plus d'une reprise de ne pas prendre d'initiatives. En contrepoint, l'auteure sait réserver des plages de légèreté autour de ce bonhomme: celui-ci a une copine, une vraie complice, qu'il rencontre selon un rituel précis (deux jours par semaine seulement). Le lecteur goûtera les dialogues piquants qui s'installent entre les deux amants!

Enfin, Henry Baud est un passionné de puzzles, ce qui lui vaut le surnom de Commissaire Dix Mille Pièces. Ces puzzles, il les résout comme ses enquêtes: avec méthode et concentration. Le parallèle entre une intrigue policière à indices, qu'il faut collecter et faire coïncider pour reconstruire la vérité, et la construction d'un puzzle s'avère évidente. Enfin, il est permis de voir dans ce personnage qui préfère la rigueur aux éclats le reflet d'une certaine image de la Suisse, où se passe l'action: un pays calme, un peu terne peut-être (le pays a aussi ses banlieues sans âme), mais où tout se passe pour le mieux.

Du moins en apparence: quand même, l'hypothèse de l'homicide volontaire se vérifie! Les indices collectés sont divers: un peu de la couleur de la voiture, un suspect qui boit trop, un chien disparu, deux chiffres incertains sur une plaque minéralogique, et même une tombe profanée. A cela vient s'ajouter un peu de psychologie, en vue d'arriver, de manière assez linéaire, jusqu'au coupable. Henry Baud n'a certes pas à se laisser attendrir; cela dit, l'auteure dessine précisément les arguments qui s'entrechoquent dans l'esprit du commissaire au moment des aveux.

Catherine Gaillard-Sarron offre avec "Délit de fuite" un petit roman policier classique, cohérent et bien construit, qui prend le temps d'explorer les âmes humaines (celle de Henry Baud, mais aussi celle du coupable, qui a ses raisons d'agir comme il l'a fait) et ne néglige pas les moments de légèreté. En définitive, c'est un livre qu'on lit rapidement, porté par un style fluide et agréable.

 

Catherine Gaillard-Sarron, Délit de fuite, Chamblon, CGS, 2016.


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CHEMINS DE TRAVERSE

Chemins et philosophies avec Catherine Gaillard-Sarron

Billet de Daniel Fattore le 22 juin 2016

 

"Chemins de traverse": le titre de ce recueil de contes et de nouvelles peut paraître convenu. Catherine Gaillard-Sarron, son auteur, lui donne tout son sens. Avec ce nouveau livre, l'écrivaine choisit d'explorer de nouvelles possibilités offertes par le genre de la nouvelle, après avoir offert plus d'un recueil, d'inspiration fantastique ou quotidienne.

Chemins, donc. Ceux-ci sont une constante dans ce recueil, au sens propre comme au sens figuré, l'un n'allant le plus souvent pas sans l'autre. Ce thème classique est annoncé dès la première nouvelle, "Le chemin", qui a des allures de prose poétique, décrivant les beautés d'un paysage. De manière évidente, il adopte une forme cyclique, annoncée dès ses premières phrases: "Il n'a pas de début et pas de fin non plus" - une idée reprise à la fin: "Car mon chemin n'a pas de début et pas de fin non plus." Phrase reprise, à peine modifiée - une modification qui porte tout le sens de l'enrichissement du chemin parcouru, même si les points de départ et d'arrivée se confondent.

Le ton est ainsi donné: plutôt que de l'action, il y aura de la réflexion et de la poésie dans les pages de "Chemins de traverse". Plus d'une nouvelle utilise les versions modernes du chemin que les humains parcourent comme prétexte à des moments de réflexion, la pensée cheminant au fil du parcours. Cela peut être un parcours en voiture ("Musicomane"), une randonnée où l'on cause ("Les marcheurs") ou même un voyage attendu mais jamais effectué ("Terminus...", beau moment de réflexion immobile de la part d'un homme mangé par son travail)

L'auteure partage au fil des pages une vision du monde personnelle et aborde des questions que tout un chacun se pose: la mort qui peut frapper un couple, et alors, vaut-il mieux partir le premier? ("Les marcheurs"), les distractions du quotidien qui éloignent de l'essentiel qui se trouve au fond de chacun de nous ("Le visiteur", avec son personnage d'ado bloqué dans une chambre avec l'interdiction de bouger à la suite d'un accident). Si les sujets sont graves et touchent à l'essentiel, ils n'excluent pas un certain sourire, ni les clins d’œil au lecteur astucieux: si le nom de Crassote, sage du socratique "Dialogue sur la solitude", prête à sourire, on se souviendra qu'il rappelle aussi le mot russe qui signifie beauté (красота).

Ces nouvelles invitent chacune et chacun à réfléchir en douceur aux grandes questions de la vie. Le lecteur pourra dès lors être surpris par le côté péremptoire de "Le Grand Rêve", long dialogue entre une grand-mère et sa petite-fille autour des hommes et des femmes, marqué par un secret aux allures de complot féminin et installant un manichéisme primaire entre les hommes, présentés comme dominateurs et égoïstes (même s'ils ne le sont pas en apparence), et les femmes, sensibles et pleines d'amour, et en définitive supérieures aux hommes. L'auteure oppose ici l'image d'un spermatozoïde, viril et conquérant, et celle d'un ovule, aimable et rond. Ce texte détonne ici: une vision aussi clivée a-t-elle sa place ici?

"Le Grand Rêve" suggère, cela dit, l'idée païenne de la possibilité d'un dieu femme. C'est que l'auteure tourne autour de l'idée de la divinité au fil des pages, acceptant volontiers, de manière presque évidente, la possibilité d'une transcendance. Dieu des chrétiens ou autre chose? La question est ouverte; l'auteure va jusqu'à intituler une de ses nouvelles "Le Grand Horloger", ce qui est la traduction d'une certaine vision d'un principe qui dépasse l'humain et organise l'univers dans ses rouages. Cela, sans exclure que c'est peut-être en nous que se trouve ce principe transcendant - une sorte de "δαίμων" socratique. Socrate, encore lui...

Provocants ou méditatifs, les textes de "Chemins de traverse" s'avèrent de bons points de départ pour des réflexions personnelles, tournant autour de thèmes qui concernent chaque lecteur. L'auteure offre ses pistes de réflexion, ses éléments de réponse, dans une écriture abordable qui ne perd pas le contact avec le concret, puisqu'il met à chaque fois en scène des personnages humains ordinaires comme point de départ. Cela, au gré d'un recueil bien construit: si la dernière nouvelle s'intitule "Le bout du chemin" et suggère la fin de vie, ce n'est pas tout à fait un hasard...

 

Catherine Gaillard-Sarron, Chemins de traverse, Chambon, Catherine Gaillard-Sarron, 2016.

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CHEMINS DE TRAVERSE

                                                                                   Comment philosopher à travers les contes

                                                                                                Billets de François Gachoud

 

Comment philosopher en profondeur à travers des contes? Catherine Gaillard-Sarron excelle en cet art fort rare. Car elle a compris qu'une des meilleures manières d'apprendre à penser passe par le caractère pédagogique de la création fictive. En cela, elle rejoint le génial Voltaire qui, dans Candide ou Zadig, a brillé dans le genre.


J'invite lectrices et lecteurs à découvrir ces récits où des chemins de vie, des chemins insolites, surprenants parfois, se dévoilent à travers des personnages très vivants. Comme ce John en quête de son temps intérieur aux dimensions infinies "Le grand Horloger" ou ce couple de marcheurs qui dialoguent sur l'amour en quête de son éternité possible "Les marcheurs".

Le plus étonnant parmi ces contes est sans doute "Le Grand Rêve" où une grand-mère initie sa petite fille à la découverte des vertus trop oubliées de la féminité proposée comme matrice originelle de tout amour humain. A l'heure où il y a encore tant à faire pour donner toute sa place au rôle de la femme dans nos sociétés, ce conte est porteur d'un message prophétique. Ce recueil à lire avec une curiosité vive et sans modération.


François Gachoud, philosophe le 12.3.17

 

Je recommande vivement la découverte et la lecture des œuvres de Catherine. Elle est avant tout une observatrice rare non seulement des comportements humains en lesquels nous nous reconnaissons, mais aussi une poétesse et une conteuse qui excelle dans la composition de ses recueils en vers et, pour ce qui est des contes, des nouvelles, une analyste profonde du cœur humain en ses dimensions sensibles, affectives et surtout spirituelles.

Son recueil paru en avril 2016 Sous le titre "CHEMINS DE TRAVERSE" est à mon sens une réussite unique: ses descriptions et méditations sur le temps, sur l'amour, sur la mort, sur le rôle central du féminin donateur de vie, sur notre aspiration à la présence de l'Esprit sont des modèles d'écriture et de sagesse à relire et méditer à notre tour."

François Gachoud, écrivain et philosophe 12.12.16

 

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 ALLONS VOIR SI LA ROSE...

Catherine Gaillard-Sarron et le piquant des roses

Postface de Anne-Catherine Biner

Billet de Daniel Fattore le 24 novembre 2015

 

Quand les querelles de voisinage sont le premier poison du vivre-ensemble...

Dans son premier roman, intitulé "Allons voir si la rose...", Catherine Gaillard-Sarron installe une bisbille entre monomaniaques, et s'amuse à décortiquer avec un certain bonheur la psychologie et les très humaines faiblesses de de ses personnages

Ce premier roman a les airs d'une nouvelle amplifiée, notamment par l'extension de la psychologie des personnages. Stramer, présenté comme un monomaniaque des roses, paraît s'intéresser aussi à ce qui se passe autour de lui, de manière plus ou moins probable. Si on le suit volontiers dans ses réflexions sur le spécisme (le lion Cecil fait une apparition), on a de la peine à croire à sa critique de Gabriel Matzneff: un chimiste à la retraite aux ascendances germaniques s'intéresse-t-il forcément au prix Renaudot de l'essai? Quelques pistes, par ailleurs, sont installées. Il est regrettable qu'elles ne soient pas poursuivies plus avant, surtout si elles sont évoquées avec vigueur - on pense au goût de Stramer le misanthrope pour les "professionnelles", mentionné deux fois par l'auteur - or, celles-ci n'interviennent pas dans ce roman.

S'il est délicieusement caricatural, le portrait du couple de voisins, les Crosmou, s'avère aussi nettement plus crédible. Il se fonde sur l'interaction asymétrique entre une femme puissante pour ne pas dire violente, dont le physique imposant reflète le caractère envahissant, et son mari, figure veule et fluette - qui porte cependant le nom bien félin de Félix. Cela, sans oublier le chat, justement, par lequel tout passe, ce qui ne manque pas de faire endêver le fameux Félix. L'auteure fait de cette bestiole, précieuse bête à concours, un élément clé (mais corrosif) de la relation conjugale, ce qui ne manquera pas de divertir le lecteur.

Divertir? Certes, le propos est grave puisqu'il est question d'une hostilité entre voisins, qui se développe en un crescendo rapide à l'apothéose bien campée quoique tragique. Les situations sont caricaturales, le lecteur le comprend en côtoyant des personnages tels que l'auteure sait les construire. L'onomastique, cela dit, s'avère amusante: les personnages portent des noms évocateurs et, surtout, certains mots et marques actuels, suisses à l'occasion, sont travestis afin de leur donner un côté ridicule auquel tout le monde a pensé un jour ou l'autre.

Le début paraîtra certes peu percutant au lecteur, l'auteur ayant choisi d'installer doucement son intrigue en présentant le personnage de Stramer. Mais il sera utile d'aller au-delà de cette impression pour arriver à un final bien éclatant, mené tambour battant, qui amène son lot de morts pleins de caractère au terme d'un ouvrage qui sait se faire à la fois cocasse, piquant et intelligent: si l'on sourit à certaines outrances, on se surprend aussi à réfléchir ou à s'interroger au détour d'une phrase, d'une page de ce livre aux allures de faux journal.

 

Catherine Gaillard-Sarron, Allons voir si la rose..., Chamblon, Catherine Gaillard-Sarron, 2015.

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      ENTRETIEN SUR L’AUTOÉDITION 

Kroniques.com 3.04.15

 

* Amandine Glévarec – Quel a été le parcours qui vous a mené à publier en auto-édition ?

Catherine Gaillard-Sarron – C’est classique de le dire mais je suis une grande lectrice et j’ai toujours aimé le français et l’écrit. Le temps n’a fait que renforcer cette inclination pour la littérature et l’écriture est devenue, au fil des ans, une véritable passion. L’écriture est ma voie, le sens que je veux donner à ma vie. On ne demande pas à l’oiseau pourquoi il chante : il a sa fonction comme le poète ou l’écrivain.
J’ai toujours écrit des poèmes et des chansons. Ma passion pour les nouvelles date d’une douzaine d’années. On écrit pour de multiples raisons. Pour ma part, j’écris parce que l’écriture me libère et que j’aime raconter des histoires. Au travers de mes divers personnages je peux dire ce qui me tient à cœur, dénoncer et transmettre jusqu’au plus intime. Car qu’est-ce qu’écrire sinon révéler à tous, au travers d’histoires et d’expériences particulières, l’humanité et l’universalité contenue en chacun ?

Après avoir écrit des centaines de poèmes et des dizaines de nouvelles en tout genre, j’ai évidemment envisagé la publication qui est l’aboutissement logique du processus d’écriture pour un auteur. Je me suis alors rapidement rendue compte que c’était quasi impossible pour la poésie et extrêmement difficile pour les nouvelles. Deux recueils de nouvelles ont toutefois paru aux Éditions Plaisir de lire en 2009 et 2010. Depuis, hélas, Plaisir de Lire attend le bon vouloir des donateurs pour publier mes ouvrages et sans subsides, pas de livres. Après avoir patienté quatre longues années et compte tenu du fait que je n’avais plus envie de me lancer dans une recherche d’éditeurs – quête onéreuse, chronophage et par trop incertaine –, j'ai décidé, en août 2014, de publier mes recueils de nouvelles en autoédition, comme je le faisais déjà depuis plusieurs années pour mes recueils de poèmes. Outre de meilleurs revenus, le choix du prix de vente, un temps de production plus court et la conservation de tous mes droits, j’ai le contrôle absolu de toutes les étapes du processus de création de mes livres ainsi que la liberté totale de faire avancer les projets à mon rythme. Autant d’avantages et d’indépendance qui s’avèrent déterminants pour moi.

J’aimerais préciser que l’autoédition n’est pas de l’édition à compte d’auteur. Dans ce dernier cas, l’auteur confie à un éditeur qui pratique le compte d’auteur le soin de réaliser son livre et il le paie pour cela, parfois très cher. Dans le cas de l’autoédition, en particulier l’autoédition que je pratique, l’auteur réalise lui-même son ouvrage : relecture, corrections, mise en page, graphisme, photo, couverture du livre, demande du n° ISBN, recherche d’un imprimeur, dépôt légal. Il fait exactement le travail de l’éditeur traditionnel et assume également tous les risques de l’opération, de la création à la production.

Certes, il existe de nombreuses plateformes sur Internet comme Publibook, Edilivre, Mon petit éditeur, Lulu.com, etc., pour réaliser son livre gratuitement. Mais tout n’est pas aussi gratuit, rentable et intéressant qu’il n’y paraît au premier abord. Si vous n’êtes pas un spécialiste ou que vous rechignez à retrousser vos manches, vous devrez recourir à des services payants, ce qui augmentera  notablement votre facture, et vous devrez également accepter des conditions éditoriales qui peuvent sembler contraignantes. Pour ma part, après avoir étudié les diverses offres, j’ai finalement opté pour l’autoédition « Maison » et indépendante car je trouvais plus judicieux et avantageux d’acheter et de gérer moi-même mon stock de livres plutôt que de devoir les racheter à une plateforme quelconque pour pouvoir les revendre ensuite. Je suis libre, par ailleurs, de choisir le format de mes ouvrages, la mise en page et le graphisme de mes différentes collections. De surcroît, mes droits d’auteur s’élèvent à présent à 100% et non plus à 10%. En conséquence, sachant que les droits d’auteur de mes deux livres publiés à compte d’éditeur ne m’ont pas rapporté cinquante francs sur les trois dernières années, je ne vois vraiment plus l’intérêt de céder tous mes droits à un Éditeur pour n’obtenir, en contrepartie, qu’une référence dans un catalogue.

Pour autant, l’autoédition n’est pas une solution de facilité, bien au contraire, c’est un choix difficile et courageux, souvent la seule option qui reste à un auteur déterminé pour mener à terme son travail, car en plus des compétences, du temps, de l’énergie et de l’argent qu’il faut investir pour créer un livre, l’autoédition, à quelques exceptions près, est généralement ignorée voire méprisée par les Éditeurs, Médias, libraires et littérateurs de tout poil. Le fait qu’un auteur soit publié chez un éditeur « reconnu » ne garantit ni le talent de l’écrivain, ni la qualité du livre et encore moins ses ventes. Quand un éditeur laisse entendre qu’il ne choisit qu’un manuscrit sur 800, on est en droit de penser que son choix, en plus d’être subjectif, ne peut être qu’arbitraire et déterminé par une ligne éditoriale stricte ou des subsides spécifiques. (Voir art. Le Temps du 17.6.13 – Jadd Hilal).

Si dans le contexte actuel il est toujours plus difficile de se faire éditer, cela s’avère encore plus compliqué en Suisse romande. Et lorsque vous ne pouvez vous prévaloir d’aucun soutien, ni relation (on ne délivre ni bourse, ni subside, ni prix à un auteur autoédité puisque ce dernier n’est pas reconnu par le système en place. Donc, aucune chance pour lui que ses écrits soient remarqués, encouragés ou primés), il ne vous reste d’autre alternative que l’autoédition pour mettre au monde vos œuvres et leur donner une chance d’exister et de vivre leur vie.

 

A. G. – Combien cela vous a-t-il coûté ?

C. G.-S. – Quand on aime on ne compte pas ! L’adage vaut pour toute passion, écriture et autoédition comprises. Pour promouvoir mon travail j’ai réalisé successivement 3 sites internet (2005, 2013, 2015), le dernier vient d’être publié et il a nécessité plus de 250 heures de travail ; temps que je ne mets évidemment pas au service de mon écriture proprement dite. Par ailleurs, pour le construire, j’ai également dû apprendre à utiliser les outils qui me permettaient de le créer.

Pour les livres, le travail est titanesque puisque, hormis l’aide de mon mari en qualité de correcteur, j’accomplis seule toutes les étapes, de la relecture à la couverture. Je vais prochainement réaliser mon 14e ouvrage. Autant vous dire que même si mon travail me passionne ce n’est, et de loin, pas une sinécure. Mais c’est un choix voulu et assumé. J’ai arrêté mon activité professionnelle en 2009 pour me consacrer entièrement à l’écriture et je ne l’ai pas regretté une minute, même si ce travail n’est pas reconnu autant que je le souhaiterais.

Découvrir le bon imprimeur m’a également demandé beaucoup d’énergie, tout comme la recherche d’informations concernant certains aspects techniques et administratifs relatifs à l’édition. Pour le coût de l’impression, les tarifs de l’imprimeur vont dépendre du choix du papier, de la qualité de la couverture et du nombre de pages et d’exemplaires de l’ouvrage. Cent recueils de poèmes de 150 pages avec un papier spécial reviennent à environ 450 euros. Cent-cinquante livres de 250 pages avec un papier ordinaire (bouffant blanc) à environ 600 euros. Ces prix s’entendent naturellement sans l’achat du n° ISBN, des frais de douane et du transport vers la Suisse. Et bien sûr sans le travail effectué par l’auteur lui-même qui remet un PDF fini de son travail à l’imprimeur. Les prix peuvent varier selon les imprimeurs. Ne pas hésiter à demander des devis.

 

A. G. – Êtes-vous satisfaite du résultat ?

C. G.-S. – Après quelques péripéties et déboires quant à la qualité d’impression de mes premiers recueils, je collabore aujourd’hui avec un imprimeur qui me donne entière satisfaction tant au niveau de la qualité des ouvrages que des délais impartis. Je tiens cependant à souligner que l’imprimeur ne fait qu’imprimer le PDF du livre que vous lui remettez et que si la mise en page et la couverture de celui-ci sont médiocres, le résultat le sera aussi. C’est à l’auteur que revient cette responsabilité. Ce dernier doit s’efforcer de contrôler tous les aspects de la production afin de proposer un objet de qualité quasi professionnelle à ses lecteurs.

Évidemment, le grand problème de l’autoédition reste la promotion et la diffusion. Comme je n’ai pas choisi les plateformes d’autopublication pour réaliser mes livres, je ne bénéficie pas non plus de publicité sur ces sites ou sur Amazon, par exemple. Néanmoins, même si les auteurs restent très discrets sur le sujet, divers témoignages montrent que la plupart de ceux qui y recourent ne vendent que peu de livres par ce biais. Certes, les livres sont visibles sur Amazon et autres sites de ventes, mais encore faut-il que les lecteurs en connaissent l'existence ! À ce point de l’histoire, mes ouvrages sont finalement plus visibles sur mon site personnel que noyés au milieu de millions d’autres… 

J’assure donc seule la publicité et la promotion de mes livres au travers de mon site Internet et de divers documents tels que catalogues, prospectus, signets, invitations, etc. Je soigne particulièrement mes vernissages qui sont, avec les salons et les lectures, privées ou publiques, des occasions privilégiées pour moi de rencontrer mes lecteurs et de faire connaître mon travail. Basée sur le bouche à oreille, ma stratégie s’apparente  à celle du colimaçon et mes ventes augmentent régulièrement à chaque vernissage.

Si ma motivation première reste de partager mes écrits avec un lectorat, mon objectif est naturellement de diffuser mes ouvrages et de les vendre, leur réalisation nécessitant un investissement conséquent et un travail considérable. Par ailleurs, tout travail mérite un salaire et par respect pour le temps et l’énergie investis dans ce travail, je me dois de tout faire pour donner à ces livres une chance d’être lus. Si écrire c’est donner une forme à sa pensée et réaliser un livre c’est la matérialiser, la publication lui donne une légitimité et la diffusion permet qu’elle soit connue et reconnue. Sans audience, pas d’existence possible pour un auteur.

Je crois à mon travail et malgré tous les aléas et le peu de soutien que j’ai rencontrés dans cette aventure, je suis heureuse de constater que mes nouvelles et mes poèmes, même publiés en autoédition, trouvent grâce aux oreilles de la RTS, de la BSR et de nombreux amis. C’est pourquoi, je ne peux qu’encourager les auteurs suffisamment déterminés dans leurs projets à aller au bout de leurs rêves. L’alternative à l’édition existe : c’est l’autoédition, c’est une voie ingrate et risquée mais elle est possible avec de la volonté, de l’enthousiasme, de la persévérance et beaucoup de travail...

 

* Ce texte est la version longue de l'entretien accordé à Littérature-romande.net le 3 avril 2015. Pour lire l'original cliquer sur le lien en sous-titre.  Pour info sur le sujet, chronique de Jean- Yves Normant Bookelis.com   

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LA FENÊTRE AUX ALOUETTES

Une fenêtre ouverte sur les âmes

 Préface de Jacqueline Thévoz

Billet de Daniel Fattore le 21 janvier 2015

 

Pratiquement en même temps que son recueil "Paquet surprise", la poétesse et écrivaine franco-suisse Catherine Gaillard-Sarron a publié un autre florilège de nouvelles, "La Fenêtre aux alouettes" - merci à elle pour l'envoi! Avec ce nouveau recueil, elle s'installe comme une auteure de nouvelles romande à l'indéniable personnalité. Préfacé par Jacqueline Thévoz, auréolé d'un Scribe d'argent décroché à Moudon, "La Fenêtre aux alouettes" rallie les thèmes de prédilection de Catherine Gaillard-Sarron, dans une optique psychologique - c'est une constante de ce recueil.

L'exploration des âmes est minutieuse et crédible dès la première nouvelle, "Impulsion": un moment de tension en familiale, un peu d'alcool, une situation qui dérape... à chaque péripétie, l'auteure analyse ce qui se passe dans la tête de deux personnages séparés par les circonstances. Et côté péripéties, les personnages sont servis, ce qui permet à l'auteur de les creuser jusqu'au bout. Ce qui les rend profondément humains.

Cette approche peut déboucher sur un rythme de narration assez lent, et laisser l'impression qu'il ne se passe pas grand-chose - ou alors que l'action est tout intérieure et que l'attention est invitée à se porter sur des détails d'importance. C'est le cas dans des nouvelles comme "Parfum de vie" ou "Amour éternel", que l'on savoure donc plus longuement.

Si certaines nouvelles sont donc plus longues, plus développées et approfondies, d'autres sont brèves et fulgurantes, à l'instar de "Comme une bougie dans le vent...", qui décline, en un clin d'oeil sympathique, la figure d'Elton John, ou "Humour noir!" qui, rédigée dans un style familier qui claque bien, revisite le genre du "bon tour" facétieux cher aux nouvellistes d'antan, à la manière la plus moderne qui soit: un peu de teinture bien placée suffit pour faire naître un sourire!

On retrouve enfin dans "La Fenêtre aux alouettes" certains éléments familiers à l'auteure. Les hommes ont souvent le mauvais rôle (mais les femmes sont-elles toujours meilleures?), et il arrive que certains drames soient accentués par la consommation déraisonnable et délétère d'alcool. Par ailleurs, comme dans "Paquet surprise", on trouvera des textes d'une certaine sensualité, où les sentiments et l'émotion ne sauraient manquer. Enfin, certains textes, tournant autour du motif du cristal, rappelle le thème du concours du Scribe d'Or 2013: "Noces de cristal".

Le lecteur fidèle de Catherine Gaillard-Sarron ne sera donc pas dépaysé par ce recueil. Il y trouvera cependant un fil rouge, celui de la psychologie et de l'exploration des zones sombres et claires des âmes (la rédemption est parfois au bout du chemin!), qui le distingue. Quant à la nouvelle éponyme, qui met en scène un personnage qui s'invente des histoires, elle s'avère tout un programme: "Décidément, la réalité ne valait pas ses fictions. Et sa fenêtre n'était qu'un miroir aux... alouettes."

Catherine Gaillard-Sarron, La Fenêtre aux alouettes, Chamblon, Catherine Gaillard-Sarron, 2014.

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PAQUET SURPRISE : Le parfait recueil pour Noël

Préface de François Gachoud

Billet de Daniel Fattore le 26 décembre 2014

 

Vingt-quatre nouvelles! Celles-ci constituent un florilège qui sait surprendre par le choix de certains points de vue. Elles ont une teinte généralement optimiste ou malicieuse, même si certains personnages sont détestables - en particulier les hommes mufles ou machos mis en scène. L'écriture est fluide, classique, et se met au service de moments émerveillés, curieux, souriants, voire sensuels

Des nouvelles, encore! Poétesse et nouvelliste, l'écrivaine suisse Catherine Gaillard-Sarron propose, en cette fin d'année, tout un recueil plein de surprises. Certaines font du bien, certaines dérangent, d'autres interpellent. Au final, "Paquet surprise" est un recueil auto-édité à lire - à dévorer, même - en cette période de fêtes de fin d'année.

Les premiers textes de ce recueil sont des contes de Noël modernes. Le lecteur appréciera les bonnes vibrations qui en émanent, en particulier de la première, "Le Noël de Pietro et Rosa". Cumulant les hasards heureux autour d'un couple modeste, sans histoires mais non sans rêves, elle illustre à merveille l'idée du miracle de Noël et promet que la fête est porteuse de bonheur. Rebelote avec "Au dragon pétaradant", une nouvelle qui montre que certaines prédictions peuvent devenir réalité, pour le pire et pour le meilleur. L'auteure use d'un contraste maximal pour dépeindre deux hommes: l'un est un mufle odieux, l'autre une personnalité attentionnée et élégante. Le tout, dans un "restaurant chinois vaudois": entre plats foirés et tomates farcies, la catastrophe est programmée. L'auteure n'épargne rien, pas même la "boule de glace à la fraise couverte d'une macédoine de fruits en boîte et d'un pschit de chantilly en bombe". Rien à voir avec le "restaurant chinois" de Christophe Grau...

Le lecteur coutumier de Catherine Gaillard-Sarron sait que les personnages masculins de Catherine Gaillard-Sarron ne sont pas toujours des plus sympathiques: les travers tels que la muflerie et le machisme mal placés, parfois exacerbés par la dépendance à l'alcool, reviennent régulièrement dans ses textes. L'auteure réserve quelques personnages de ce tonneau dans "Paquet surprise", peints à grands traits vigoureux, jusqu'à la caricature. L'issue de ces nouvelles est le plus souvent attendue: l'homme finit puni par là où il a péché. On aurait apprécié, parfois, un virage inattendu! Reste la manière d'y arriver, qui s'avère astucieuse, par exemple, dans "La Liste": acrostiches, anagrammes, mots croisés et jeux de mots, le parcours est savoureux comme un bonbon de Noël.

Une brassée de lettres offre à l'auteur une nouvelle occasion de jouer avec les mots et de se glisser dans la peau de personnages incongrus: des wagons, la chèvre de Monsieur Seguin, etc. La signature fait ici figure de chute, donnant à ces lettres un vrai statut de nouvelle. Et l'on glisse, en fin de récit, vers des textes sensuels, voire érotiques - "La demande" rappelle que pour de grands moments, peu importe le décor... et "Aventure intra-sensorielle" permet à l'auteure de boucler son recueil sur un ultime orgasme. Quoi de mieux?

Préfacé par le philosophe François Gachoud, le recueil de nouvelles "Paquet surprise" porte bien son nom: il s'agit d'un florilège de textes divers, regroupés en fonction de thématiques qui rapprochent certains d'entre eux. Parfois prévisibles certes, ces nouvelles surprennent le plus souvent, font volontiers sourire, et savent émerveiller grâce à un optimisme certain.

 

Catherine Gaillard-Sarron, Paquet surprise, Chamblon, Catherine Gaillard-Sarron, 2014. Préface de François Gachoud.

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DES TAUREAUX ET DES FEMMES  : "Ah, la vache!

Éditions Plaisir de Lire - Collection Aujourd'hui 2010

Billet de Daniel Fattore le 10 avril 2013 

 

Un recueil de nouvelles qui fait pendant à "Un fauteuil pour trois", du même auteur: alors que ce dernier faisait frissonner, "Des taureaux et des femmes" donne à réfléchir sur les relations humaines et sur certains aspects graves (domination de l'homme ou de la femme dans le couple, par exemple). L'auteur évite l'écueil du plombant en gardant toujours un certain esprit, un certain humour.  

Difficile de faire un titre de billet malin à partir de celui du recueil de nouvelles "Des taureaux et des femmes" de Catherine Gaillard-Sarron. Pourtant, il y est bien question de bovins, au sens propre ou métaphorique. Ainsi les vaches et les taureaux font-ils figure, tout au long du recueil, de leitmotiv. Cela, sans compter les bœufs, qui ne sont autres que des taureaux castrés: l'ultime nouvelle du recueil, "L'histoire de Kim Lalesh", un conte des plus sensuels, en présente un fort beau spécimen. Mais n'anticipons pas...

... Ce recueil de nouvelles se pose en complément au recueil "Un fauteuil pour trois": alors que ce dernier se concentre sur des textes qui font frissonner (fantastique, horreur), "Des taureaux et des femmes" met en scène des destinées humaines, sans une once de fantastique, mais avec leur lot de dominations et de soumissions - cela, après une première nouvelle, "Des taureaux et des femmes", qui suggère une recherche de l'accord parfait. Si sa fin, fondée sur une astuce grammaticale, est un peu facile, le lecteur goûtera le caractère habile et enlevé du développement, qui file avec adresse la métaphore tauromachique et exploite le champ lexical taurin. Au final, voilà troussée une course-poursuite entre deux amoureux qui a tout d'une aimable corrida de l'amour vache. De quoi séduire le jury du prix Ernest Hemingway!

Une telle harmonie tranche avec les autres nouvelles du récit. La plupart d'entre elles relatent en effet des dissonances entre êtres humains, et des vies de couple vues, souvent, dans une optique de domination crasse. Le lecteur appréciera ainsi la finesse toute relative (et c'est peu de le dire) de l'homme dans "La Lisette" - un prénom que l'auteur a déjà utilisé ailleurs dans ses œuvres, dans un recueil intitulé "La Lisette, Paul, Martha et les autres", paru en décembre 2007, et vu comme le parangon d'une destinée féminine faite de frustrations bien réelles et d'espoirs sans cesse déçus. La dédicace de "Des taureaux et des femmes" donne du reste à "Lisette" le caractère d'un nom commun désignant ce type de destinée féminine, que les nécessités de l'existence ont subordonnée à un homme dépourvu de toute finesse et de toute empathie - un agriculteur, par exemple, éleveur de bovins, figure que l'auteur exploite ici.

Certaines nouvelles du recueil sont fulgurantes, à l'instar des astucieuses nouvelles à chute "Réminiscence" et "L'Affaire de Noël" - une affaire non dépourvue de cruauté, disons-le. Dans ce registre, le lecteur goûtera aussi avec plaisir "Le Sermon du Père Fides", récit humoristique qui rapproche la religion chrétienne et un certain produit de bienfaisance très à la mode. Le nom en forme de jeu de mots du personnage, cité dans le titre, guide le lecteur: il convient de lire cela au deuxième degré, en gardant à l'esprit que c'est pour rire - et que Dieu est (aussi) humour. Cette dernière idée, l'auteure de "Des taureaux et des femmes" l'exploite aussi ailleurs, en particulier dans "Le fantasme du curé", nouvelle plus développée, au parfum rétro (le curé monte encore en chaire pour dire son sermon). Cette nouvelle est adroite, perverse même, puisqu'elle pousse le lecteur à avancer dans sa lecture en flattant son côté voyeur: au fond, elle suggère que le curé a des pensées aussi secrètes que coupables... qu'on aimerait bien connaître!

Le lecteur pourra avoir l'impression, au fil des nouvelles, que les femmes sont toujours victimes des hommes. Quelques nouvelles suggèrent cependant l'inverse, ou indiquent que tout n'est pas si simple. "Paul et Martha" est l'une d'entre elles: comment condamner ce brave Paul, conjoint d'une Martha qui a tout d'une Tatie Danielle? Et que penser de la vengeance du mari trompé dans "Aux mille et un pâtés"? Certes, il paraît bien sûr de lui; certes, le lecteur voit venir l'issue d'assez loin; mais malgré ces faiblesses, le lecteur se délectera de quelques descriptions culinaires appétissantes... avant de découvrir la terrible réalité des plats. 

Au fil des nouvelles, le lecteur est promené dans des relations interpersonnelles et de couple qui dysfonctionnent et cahotent, jusqu'à la folie ("Monsieur Herbert"), et certaines pages de "Des taureaux des femmes" ont un petit goût amer ou dérangeant. Cela dit, l'auteur indique de façon claire que tout cela n'est pas à prendre trop au sérieux - l'onomastique des personnages, en particulier, le signale, riche en jeux de mots subtils ou directs. Ainsi le lecteur fera-t-il la connaissance de Kim Lalesh (on imagine ce qui lui plaît...), de Madame Currit-Vaire (qui ne manque pas de piquant, finalement) et, bien sûr, du Père Fides, insidieux d'entre les insidieux. Ainsi, tout en soulevant des sujets graves liés aux relations interpersonnelles, l'auteure offre toujours un espace ludique au lecteur, et évite ainsi, fort justement, de plomber l'ambiance.

 

Catherine Gaillard-Sarron, Des taureaux et des femmes, Lausanne, Plaisir de lire, 2011.

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DES TAUREAUX ET DES FEMMES 

Espace 2 Émission  Entre les lignes

Entretien avec Jean-Marie Félix et Christine Gonzalez le 3 mars 2011

 

Catherine Gaillard-Sarron : «Des taureaux et des femmes»

Couverture de "Des taureaux et des femmes" [Editions Plaisir de lire]Couverture de "Des taureaux et des femmes" [Editions Plaisir de lire]

Couverture de "Des taureaux et des femmes" [Éditions Plaisir de lire]

Composé de vingt nouvelles, le recueil «Des taureaux et des femmes», publié aux éditions Plaisir de Lire, explore le côté sombre des individus.
«Que reste-t-il de la tendresse des hommes?», s’interroge l’auteure, lorsque se côtoient faiblesse, folie, vengeance et imagination morbide.


Catherine Gaillard-Sarron se décrit comme une « diseuse de vie ». Franc-comtoise d’origine et vaudoise par mariage, Catherine Gaillard-Sarron aime explorer les genres – poésie, nouvelle, chanson ou encore roman policier – et se consacre désormais entièrement à l’écriture.

Différents prix ont déjà couronné ses textes. « Des taureaux et des femmes » est le deuxième recueil de nouvelles de Catherine Gaillard-Sarron. Le premier, « Un fauteuil pour trois » (éditions Plaisir de Lire), revisitait tout particulièrement le genre fantastique.

Entre les lignes dressera le portrait de cet auteur se considérant comme « une femme ordinaire qui parle de gens ordinaires ». L’occasion, aussi, de découvrir ses textes et son univers.

Catherine Gaillard-Sarron viendra accompagnée d’Isabelle Cardis Isely, présidente de l’association Plaisir de Lire. Cette passionnée de littérature évoquera les publications de cette édition encore méconnue du grand public.

Par Christine Gonzalez

Lectures: Christine Vouilloz

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UN FAUTEUIL POUR TROIS : Le fantastique revisité

 

Catherine Gaillard-Sarron a publié l'an dernier un recueil de dix nouvelles d'essence fantastique à la saveur particulièrement agréable - une belle découverte, pour tout dire! Il y a certes de belles frayeurs, de belles inquiétudes et des nuits blanches à revendre, mais il y a aussi de la tendresse dans ces récits, et un certain humour - parfois franchement potache, parfois joliment noir. 

A l'heure où l'écrivain suisse Catherine Gaillard-Sarron publie son deuxième recueil de nouvelles, "Des taureaux et des femmes", il était grand temps que je me plonge dans son premier recueil, "Un fauteuil pour trois", qui hantait ma pile à lire depuis pas mal de temps. Et je ne regrette pas mes heures de lecture: au gré de quelque 174 pages, c'est tout le genre fantastique qu'elle revisite, s'appropriant avec adresse les ressorts du genre et les nimbant d'une once de tendresse et d'esprit qui leur donne toute leur saveur.
C'est le plus souvent en se concentrant sur le point de vue d'un seul personnage que ses nouvelles se déroulent. Ce personnage peut être présenté seul et isolé, comme c'est le cas dans "La dernière garde", où est peinte la fin étrange d'une vieille dame, à la veille de ses 80 ans - nouvelle où le surréel vient se substituer tout en douceur au réel afin de suggérer le grand départ, une nuit inquiétante en forêt. Incertitude, lieux étranges, peur diffuse: tout est là pour constituer une atmosphère fantastique.

La forêt est aussi le décor de "L'Odeur", qui, du fait de son rythme haletant, a quelque chose qui rappelle Stephen King. L'auteur a bien su percevoir que souvent, les éléments négatifs sont, pour tout un chacun, associés à une odeur. Ici, elle est présentée comme indéfinissable et obsédante - la mort, peut-être? Cette base bien trouvée sert de substrat à un flash-back familial, puis à la hantise de tout un chacun: avoir un accident, seul, en forêt...

De la sensualité, il y en a aussi - et à ce titre, la nouvelle "Un fauteuil pour trois" est emblématique. Doit-on sourire à cette aventure? Elle est en tout cas énorme, entre ce fauteuil qui prend un malicieux plaisir à masser ceux qui s'y asseoient avant de leur faire un sort. L'humour noir est ici au rendez-vous, entre outrances et horreur, entre Eros et Thanatos.

Humour également dans un petit récit intitulé "Télé à chat!" qui, sous des dehors cocasses, donne à réfléchir à nos postures lorsque nous regardons la télévision et, plus largement, à l'importance parfois surfaite que nous donnons à ce que propose cette folle du logis. Sourires qui naissent également des jeux de mots parfois potaches émanant de la désignation de l'animal. Ce qui rappelle la funeste destinée du lapin "hamlétien" de "Courir ou ne pas courir?" (qui, à titre personnel, me rappelle quelques bestioles à longues oreilles vues chez Ivan Sigg...).

Ou, dans un registre plus grave, la dramatique destinée, relatée à traits trépidants, d'une espèce en voie de disparition relative dans la nouvelle à chute "Sans sommation".

Il faudrait aussi relever la belle histoire d'amour de "Songe d'une journée d'été", nimbée de merveilleux, ou les dialogues avec Dieu (vraiment?) de "Le passe-pensées" et d'autres petits bijoux encore. Les dix récits du recueil sont portés par un style classique, soigné, empreint de tendresse et riche en clins d’œil aux personnages, à la Suisse romande et à d'autres régions du globe.

Enrichi d'une postface de Pierre-Yves Lador, ce petit livre vaut bien une lecture!

 

Catherine Gaillard-Sarron, Un fauteuil pour trois, Lausanne, Plaisir de lire, 2009.

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